03 février 2013

POINT DE VUE ÉNERGÉTISTE D'APRÈS JUNG


La libido ; un système d’énergie

Chez Jung, le terme libido fait aussi figure de concept opératoire. À la différence que les conceptions de Jung sur la libido permettent d’aller plus loin et plus haut dans les explications de l’énergétique psychique de l’homme. La libido pour lui est d’abord un concept neutre ; l’énergie psychique ne peut pas avoir une spécification, elle a une valeur quantitative mais non qualitative. Car l’énergie psychique, c’est l’énergie de l’instinct de vie en général. Autrement dit la théorie jungienne de la libido ne repose pas sur l’action à la base de la vie psychique d’un seul instinct, l’impulsion sexuelle. Pour lui, l’instinct sexuel doit être placé au même niveau que par exemple l’instinct de nutrition. Ces instincts, comme d’autres relèvent d’un appetitus non hégémonique et naturel. La libido n’est pas synonyme de faim sexuelle pour Jung. Et le refoulement ne concerne pas seulement la sexualité, mais peut concerner tous les instincts. On ne saurait réduire l’énergétique de toute la psyché à un seul instinct. Car, comparativement, cela reviendrait à postuler qu’il n’existe qu’une seule vérité ou une possibilité de comportement unique. Si j’osais mélanger les plans psychiques et physiques, je dirai que la libido est le corps instinctif, ou le corps vibrant de vie d’une personne. Bien sûr dans la dynamique énergique psycho-corporelle, se trouve inclus, les instincts de base ou primaires, mais pas seulement !

la turbine psychique
Le concept de libido pour Jung est synonyme d’énergie psychique, cette énergie présente quelques similitudes avec le mot énergie tel qu’on l’entend fréquemment cité dans le langage courant pour désigner en général l’énergie solaire, l’énergie électrique, atomique etc. L’énergie physique et concrète que produit la nature fonctionne en quelque sorte un peu comme l’énergie dans notre psyché. En ce sens que l’énergie qu’elle soit physique ou psychique, elle a comme destiné, soit de se décharger en ne produisant rien, soit de le faire en produisant un certain travail. Avant de produire un certain travail, on peut faire suivre à l’énergie un certain trajet qui débouche sur une transformation c’est-à-dire sur la formation d’un nouveau potentiel d’énergie mais dont la nature diffère de la source dont il est issue. 

Prenons l’exemple d’une station thermique, l’énergie mécanique qui provient de l’eau chauffée qui a été acheminée par l’homme dans une turbine, devient à l’arrivée, de l’énergie électrique qui ira alimenter directement nos maisons. L’énergie traduit donc le principe général du mouvement de la vie. Ce mouvement est finalisé, c’est-à-dire qu’il possède un but, et se trouve contenu dans la matière, c’est-à-dire à l’état de potentiel. L’énergie est donc capable de devenir une force utilisable qui possède un but, ou un potentiel d’activité par exemple. Elle est la force potentielle contenue dans la matière, qui est capable de produire un travail, parce que l’énergie est transformable et utilisable ou encore canalisable. La turbine fait subir à l’énergie un certain trajet, mais nous pouvons psychiquement aussi, lui faire prendre un certain trajet, avec plus ou moins de conscience, bien évidemment. En général lorsque la conscience fait défaut, l’énergie cherche à se décharger sans rien produire. Mais d’après Jung, l’énergie psychique tend d’elle-même, et naturellement vers la transformation, c’est-à-dire sans aucune participation consciente, l’énergie pousse à l’évolution. Jung peut affirmer cela, suite aux observations qu’il a menées sur la psychologie des peuples primitifs. Le potentiel de la libido semble se libérer, en fait, dés lors que celle-ci peut circuler et s’écouler librement.   Autrement dit l’énergie est le principe du mouvement de la vie qui donne différentes formes d’activité et d’ expression à la matière. 

La libido correspond au soubassement de l’activité intérieure de la personne, c’est-à-dire à toute sa vie psychique, et les formes qu’elle donne s’appellent des valeurs psychologiques. Ou ce qu’on appelle la volonté, les sentiments, les affects, les motivations etc. Elle est le jus de notre volonté, de nos affects, de nos motivations, elle donne épaisseur à ce qui nous fait être entier.

Le double jeu d’Eros
Ce n’est pas sans raison si l’activité énergétique intérieure fut d’abord assimilée à l’activité sexuelle de l’homme, car la libido sexuelle, ou l’Eros englobe effectivement les critères, de force qui naît de l’intérieure comportant une trajectoire, et un but. La poussée intérieure de la pulsion sexuelle cadre bien aussi avec des notions de but, de décharge, de force constellante, attachante, pouvant se fixer sur un objet, comme cela se passe avec le désir sexuel, etc. La libido telle que Jung l’a conçue, conception à laquelle je souscris plus volontiers, contient effectivement les forces d’Eros, ou d’attraction amoureuse, mais elle n’est pas l’énergie d’Eros, puisqu’elle est l’énergie qui confère force poussée, ou direction à tous les instincts. 

En somme, elle représente l’énergie du désir de vivre, d’aimer, de créer, de se relier… La manifestation de ces désirs peut ressortir dans la vie à des niveaux d’expression différents. 

L’énergie de l’instinct peut aussi transporter les forces de l’âme, car l’instinct vient de l’intérieur, et l’âme habite aussi l’intérieur de l’homme. Le mot libido en latin veut dire aimer. Et justement, dans les forces de l’amour, pourquoi n’y aurait-il pas dedans le désir d’une union sacrée et recherchée entre l’homme et sa parcelle de divinité qui attend d’éclore pour pouvoir libérer plus de valeurs et de forces spirituelles sur cette terre ?  

L’amour relève beaucoup de la force de l’instinct, Eros, mais tant que l’homme s’acharne à vouloir disposer de cet instinct pour lui (par exemple pour des besoins sécuritaires, narcissiques, matérielles} la forme supérieure de cet instinct ne peut pas sortir.
Dans la réalité, reconnaissons que l’amour et la sexualité, nous offrent le plus souvent un tout autre tableau. Un tableau qui montre que l’amour (initiatique} a souvent rendez-vous - ô misère! – avec la souffrance, le désenchantement, la désillusion, la haine, le ressentiment, la destruction, le déchirement. 

À un niveau d’analyse profond, l’amour qui part du socle spirituel de l’homme, le relie intimement à la vie et à la volonté de son âme. La destinée de l’âme est spirituelle, l’âme cherche à s’unir avec l’étincelle divine - un symbole du soi - qui vit dans l’homme. Et parfois, tant qu’elle ne l’a pas trouvée, l’instinct Eros ne nous lâche pas. Il nous éprouve et parfois il nous attache pendant longtemps à un objet, mot de la psychanalyste peu élégant pour désigner l’élu de la libido. La psychanalyse nomme autrement ce phénomène, l’investissement énergétique, ou l’investissement de la libido sur un objet. Lorsqu’elle est fixée avec de la colle forte, et qu’elle se met à stationner un peu trop longtemps, elle peut créer perversion, maladie, névrose. C’est pourquoi, on ne doit jamais se comporter à la légère vis-à-vis des flèches qu’Eros nous envoie; l’étroit fenestron qui ouvre sur notre étincelle divine n’est pas facile à trouver et le trajet qui nous conduit à lui n’est jamais le même pour tous… 



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